Ces dernières semaines, des reportages ont été réalisés en Israël pour des médias nationaux. Qui a financé ces voyages ? Comment cela influence-t-il le travail journalistique ?


Si vous avez regardé les journaux télévisés au cours des dernières semaines, vous avez peut-être vu, aux heures de grande écoute, des reportages sur la situation à Gaza en provenance d’Israël. Ces reportages ont été réalisés par des journalistes de Telenoticias (chaîne 7) et de Repretel (chaîne 6).

Ces deux télévisions ont-elles donc financé les déplacements de leurs journalistes pour se rapprocher du conflit ?

Apparemment, non. Selon une interview du journal La Teja avec un journaliste de Repretel, on a appris que ces voyages étaient financés par l’ambassade d’Israël :

Il a parlé à La Teja de cette aventure risquée, qu’il va vivre grâce au fait qu’il a été choisi par l’ambassade d’Israël avec 12 autres journalistes d’Amérique latine pour visiter le pays en guerre et certains de ses territoires attaqués par le Hamas.

La Teja, le 4 février

Quel est le problème ?

Le problème est que, étant financée par Israël, l’un des pays impliqués dans le conflit, la couverture sera biaisée. Comme le dit David Barrientos de La Hora Tica:.

Les médias indépendants ne devraient pas accepter tous les voyages payés par un gouvernement en conflit armé pour couvrir ce conflit, pour la simple raison que ces médias seront obligés de rapporter ce que le pays invitant veut qu’ils rapportent. Il n’y a pas de véritable indépendance éditoriale.

L’une des réponses du journaliste de Repretel lors de son entretien avec La Teja en témoigne :

Nous nous rendrons dans les communautés agricoles qui ont été attaquées maison par maison par le Hamas et nous interrogerons des personnes qui nous diront ce qu’elles ont vécu dans l’horreur de l’attaque. Nous nous rendrons également dans la région où des jeunes gens profitaient d’un festival de musique lorsque le Hamas a ouvert le feu, et nous aurons l’occasion d’interroger des parents de personnes enlevées et retenues en otage.

Il est nécessaire de mentionner que le nombre de victimes dans les deux territoires est déséquilibré et hors comparaison. Nicolas Boeglin écrit (le 26 octobre 2023) :

  • du côté palestinien, à Gaza, 7028 des personnes ont été tuées et 18 482 blessées, auxquelles il faut ajouter – en Cisjordanie – 103 tués et 1956 blessés ; tandis que dans la bande de Gaza, 7028 des personnes ont été tuées et 18 482 blessées, tandis qu’en Cisjordanie – 103 tués et 1956 blessés.
  • du côté israélien, 1400 personnes ont été tuées et 5431 blessées, ainsi qu’un mort à Gaza (et 11 blessés) et un mort en Cisjordanie (et 3 blessés).

Sans cette interview, les téléspectateurs ne seraient pas au courant de cette situation, car aucun média n’a donné d’explications.

Israël et les médias

Des reportages ont été réalisés pour les médias nationaux depuis Israël. Qui a financé ces voyages et comment cela influence-t-il le travail journalistique ?
Source : BDS movement

En 2020, le média catalan La Directa a publié une enquête révélant que le ministère israélien des Affaires stratégiques a versé une somme d’argent au Jerusalem Post en échange de la publication d’informations contre le mouvement BDS (Boycott Désinvestissement Sanctions). Il s’agit d’un mouvement pro-palestinien qui prône :

  • la fin de l’occupation israélienne
  • la colonisation des territoires palestiniens et du Golan
  • la pleine égalité des citoyens arabes israéliens vivant en Israël
  • la reconnaissance du droit au retour des réfugiés palestiniens.

Cette recherche a été reprise par le média israélien indépendant 972 Magazine.

Le Jerusalem Post s’est ensuite emparé de l’affaire et a publié en 2019 un article intitulé « Unmasking BDS » (démasquer le BDS). Il y interrogeait des fonctionnaires du ministère lui-même et des politiciens du parti républicain américain où des personnalités telles que Donald Trump étaient encensées.

En outre, le ministère a chargé le journaliste Aiden Pick, de l’organe de presse juif américain The Forward, de mener une « sale guerre » dans l’opinion publique contre ceux qui critiquent Israël.

En outre, le journal israélien Haaretz a rapporté que le gouvernement israélien a approuvé la dépense de 31,4 millions d’euros pour financer sa propagande politique.

Comme le mentionne le journal Red, les organisations israéliennes menaient déjà leur guerre médiatique contre la Palestine bien avant la situation que nous connaissons aujourd’hui à Gaza.

Aujourd’hui

Des reportages ont été réalisés pour les médias nationaux depuis Israël. Qui a financé ces voyages et comment cela influence-t-il le travail journalistique ?
Yuval Abraham (à droite) à la Berlinale. Source : VN Explore

N’oublions pas qu’il y a quelques jours, le réalisateur israélien Yuval Abraham a dénoncé les menaces de mort dont il faisait l’objet. Ceci en raison de son documentaire « No Other Land » qui met en lumière la violence des colons à l’encontre des Palestiniens en Cisjordanie.

Selon les informations publiées par El País, les autorités sanitaires de Gaza ont enregistré 25 000 décès depuis le 7 octobre. Cinq sur dix sont des mineurs, trois sur dix sont des femmes et deux sur dix sont des hommes âgés de 18 ans et plus.

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